Comment soigner un trouble bipolaire ?

Un trouble bipolaire se soigne avant tout à l’aide d’un traitement de fond, mais également avec des traitements symptomatiques. 
  
Le traitement de fond est destiné à la fois à traiter l’épisode et à prévenir les rechutes. Il peut être pris pendant des années, voire toute la vie. Les médicaments utilisés apportent des bénéfices considérables aux personnes souffrant de troubles bipolaires et améliorent significativement leur qualité de vie. 
  
Le traitement symptomatique vise quant à lui à atténuer les épisodes de manie ou d’hypomanie en cours, afin qu’ils durent le moins longtemps possible. 

Prise en charge médicamenteuse de la bipolarité

Dans le traitement des troubles bipolaires, les médicaments régulateurs de l’humeur (thymorégulateurs) constituent le traitement de fond. Ils servent à : 

  • diminuer les symptômes de l’épisode maniaque ou dépressif en cours ;
  • réduire le risque de récidive. 


Il existe plusieurs sortes de médicaments régulant l’humeur. Le choix du médicament est fait au cas par cas, en fonction des symptômes observés, ainsi qu’en prévision d’éventuels effets indésirables. Il est conditionné par l’expérience et la pratique du psychiatre. 

Il faut donc considérer que le traitement thymorégulateur « idéal » du trouble bipolaire doit répondre aux caractéristiques suivantes :

  • être efficace sur le traitement aigu de la manie et de la dépression bipolaire ;
  • être efficace sur la prévention des récidives maniaques et dépressives ;
  • ne pas inverser l’humeur ;
  • ne pas aggraver l’état en cours. 

     
Dans cette logique, on comprend pourquoi un antidépresseur ne peut pas être considéré comme un thymorégulateur. En effet, il n’est pas actif sur la manie (en aigu ou en prévention des récidives) et, surtout, car il peut provoquer une inversion de l’humeur de type maniaque ou hypomaniaque chez les patients bipolaires.
 

Le lithium 

Le lithium permet de soigner à la fois les épisodes dépressifs (c’est une molécule régulièrement utilisée également dans les dépressions « non bipolaires ») et les épisodes maniaques ou hypomaniaques. Il participe à prévenir les rechutes ou les récidives des troubles bipolaires. C’est l’un des médicaments les plus utilisés dans le traitement des troubles bipolaires. 

La prescription de lithium nécessite un bilan médical complet au préalable (renouvelé tous les ans) : prise de sang (numération, formule sanguine, glycémie, dosages pour contrôler le bon fonctionnement des reins et de la thyroïde…), surveillance du cœur, test de grossesse, etc. 
 

Les antiépileptiques 

Des substances initialement développées pour lutter contre l’épilepsie comme le valproate ou la carbamazépine sont également prescrites pour réguler l’humeur.
Le valproate peut entraîner des malformations fœtales et ne peut donc pas être utiliser pendant la grossesse. Par précaution il ne peut être prescrit chez les femmes en âge de procréer qu’en cas d’inefficacité ou d’intolérance aux alternatives médicamenteuses existantes et, si toutes les conditions du programme de prévention de la grossesse sont respectées (recommandations de l’HAS).

La lamotrigine, de son côté, est un autre antiépileptique, qui peut également être prescrit en traitement et prévention des épisodes dépressifs chez les patients souffrant des différents types de bipolarité.
 

Les antipsychotiques atypiques

Certains antipsychotiques atypiques, également appelés neuroleptiques de deuxième ou troisième génération, peuvent être utilisés dans le traitement des troubles bipolaires. Ils permettent de soigner les épisodes maniaques chez certains patients, notamment pour réduire les manifestations délirantes ou hallucinatoires. Ils peuvent aussi être prescrits pour prévenir les risques de récidive. Certaines de ces molécules ont une valence antidépressive marquée et peuvent donc être utilisées dans toutes les phases de la maladie. 

Dans le traitement des troubles bipolaires, les régulateurs d’humeur sont généralement pris sur le long terme, parfois à vie, pour éviter les récidives. 
 

Le traitement des phases aigües

En phase aiguë, qu’elle soit dépressive ou maniaque, l’hospitalisation peut être nécessaire, notamment s’il existe :

  • un risque suicidaire ; 
  • un traitement ambulatoire déjà réalisé, mais qui n’a pas fonctionné ; 
  • ou si l’individu n’est pas conscient de son état. 

Prise en charge des états maniaques

Le traitement de l’état maniaque est une urgence thérapeutique, car l’épisode maniaque est un moment propice à la prise de risque (conduites dangereuses dans de nombreux domaines : sexuel, automobile, financier, etc.) et à l’épuisement. Il existe également un risque de délire et un risque suicidaire. 

La première étape de la prise en charge consiste à permettre au patient de prendre conscience de son état. En effet, certains patients ne se rendent pas compte qu’ils sont en train de faire un épisode maniaque et pensent juste aller très bien. Ce n’est pas forcément du « déni » : certains auteurs pensent qu’il s’agit d’un symptôme neurologique appelé anosognosie – c’est-à-dire que le cerveau n’est pas en mesure de se rendre compte de ce qu’il se passe.  
  
La deuxième étape est de lui faire accepter la prise d’un traitement symptomatique pour atténuer la crise le plus rapidement possible et diminuer l’agitation. Retrouver un bon rythme de sommeil est primordial dans le traitement des troubles bipolaires, c’est pourquoi le médecin pourra prescrire des somnifères (ou de la mélatonine) afin d’aider le patient à retrouver le sommeil rapidement. 

Si l’agitation du patient est très importante initialement, le professionnel de santé peut prescrire des traitements sédatifs de courte durée (neuroleptiques sédatifs, antipsychotiques atypiques, benzodiazépines), qui agissent rapidement sur ce type de manifestations. 
  
On demandera également au patient, pour réduire tout risque, de :

  • ne pas se sur-stimuler ; 
  • privilégier des activités relaxantes ; 
  • éviter la prise d’excitants, comme le café ou le thé ; 
  • éviter la prise d’alcool et autres toxiques. 

  
Dans le trouble bipolaire, le traitement symptomatique n’est pas toujours utile, même s’il est souvent nécessaire lors du premier épisode. Certains patients, qui connaissent bien leurs symptômes, arrivent eux-mêmes à gérer un certain nombre d’épisodes maniaques. En cas de rechute, si un traitement de fond est déjà en place, la première chose à faire est de vérifier l’observance pour l’optimiser ou de le changer si celui-ci ne fonctionne pas totalement. 
 

Prise en charge des phrases dépressives 

Le Dr Bourla explique que la dépression est un trouble grave qui entraîne d’importantes conséquences sur la vie des patients. L’un des premiers risques évolutifs est le suicide, et c’est d’ailleurs l’une des premières causes de mortalité du trouble bipolaire. Le principal enjeu du traitement des troubles bipolaires est donc d’éviter les épisodes de dépression
  
La prise en charge des patients sera axée sur l’association d’une psychothérapie et d’un traitement médicamenteux. Les régulateurs d’humeur qui ont une valence antidépressive seront favorisés. Si cela n’est pas suffisant, des antidépresseurs sont parfois utilisés pour une courte durée (quelques mois), mais ils sont obligatoirement associés à un médicament régulateur de l’humeur.

En effet, contrairement à une dépression « classique », la prescription d’antidépresseurs aux patients souffrant d’un trouble bipolaire se fait au cas par cas, car il existe un risque que l’antidépresseur déclenche un virage maniaque. Dans ce cas-là, il est crucial de l’arrêter immédiatement. De plus, la prise d’antidépresseurs sur le long cours peut majorer la cyclicité du trouble et même entraîner une bipolarité à cycle rapide…

L’accompagnement psychologique de la bipolarité

Psychothérapie 

Dans le traitement des troubles bipolaires, la prise en charge psychologique, associée à un traitement médicamenteux, est essentielle pour éviter la récurrence. Elle permet également d’aider les patients à comprendre ce qu’il leur arrive et à déterminer les facteurs déclenchants. 

En fonction du patient et de sa rencontre avec le thérapeute, la psychothérapie choisie peut être une : 

  • thérapie de soutien;
  • thérapie comportementale et cognitive (TCC);
  • thérapie familiale;
  • thérapie d’inspiration analytique;
  • Psychothérapie Interpersonnelle et l’Aménagement des Rythmes Sociaux (TIPARS), en association avec le traitement médicamenteux. Cette psychothérapie associe de la psycho-éducation (qui vise à apporter une meilleure connaissance du trouble par le patient, son acceptation et des stratégies de dépistage des rechutes) , une partie axée sur les rythmes sociaux et biologiques (régulation des rythmes veille-sommeil, resynchronisation sociale avec l’environnement et mise en place de routines comportementales) et un volet de psychothérapique dite interpersonnelle qui permet aux patients de mieux appréhender les problèmes relationnels conséquences de la pathologie. Notons qu’elle a été créée et validée spécifiquement pour les troubles bipolaires


La difficulté majeure du trouble bipolaire réside dans le fort risque de rechute, car l’activité de la maladie ne reste pas stable au cours de la vie. C’est pourquoi il est fortement déconseillé aux patients d’arrêter leur suivi psychiatrique, y compris en l’absence de traitement ou de symptômes.
 

Psychoéducation

La psychoéducation joue un rôle majeur dans le traitement du trouble bipolaire. Elle sert à améliorer la compréhension de la maladie et aide le patient à : 

  • identifier les symptômes annonciateurs de son trouble ; 
  • comprendre les bénéfices du traitement mis en place ;
  • gérer les effets indésirables.

  
Le patient sera davantage en mesure de prévenir ses épisodes, et sera plus rigoureux dans la prise de son traitement. 
  
La psychoéducation peut aussi être utilisée pour aider les proches du patient à mieux gérer cette pathologie au quotidien et à déceler plus rapidement les changements chez la personne souffrant de trouble bipolaire. Ils peuvent ainsi alerter le psychiatre et/ou encourager la personne à consulter rapidement. 

Le traitement de la bipolarité par sismothérapie

En cas de dépression sévère résistante aux médicaments, une option est l’électroconvulsivothérapie (anciennement appelée sismothérapie). Elle consiste à déclencher une crise d’épilepsie sous anesthésie générale en stimulant électriquement le cerveau. Antérieurement, les crises étaient déclenchées avec des médicaments, mais cela ne permettait pas de contrôler la durée des crises aussi précisément qu’avec la stimulation électrique. L’électroconvulsivothérapie peut également être prescrite en cas d’épisodes maniaques sévères et prolongés. 
  
Le Dr Bourla explique que bien que ce traitement souffre d’une mauvaise image (à tort), les séances ne durent qu’une à deux minutes. La crise d’épilepsie déclenchée dure en moyenne 20 secondes. Elles sont réalisées sous anesthésie générale et n’entraînent donc aucune douleur. La répétition des crises d’épilepsie (il en faut en général entre 4 et 20) va avoir des effets très intéressants sur le cerveau : libération de nombreux neuromédiateurs, amélioration de la plasticité cérébrale, création de nouvelles connexions… 

L’électroconvulsivothérapie va avoir un effet antidépresseur bénéfique extrêmement fort chez le patient et lui permettre de retrouver un état euthymique, d’humeur stable, dans lequel les symptômes demeurent à leur niveau minimal.
 

L’accompagnement en hôpital de jour

Le traitement du trouble bipolaire nécessite parfois l’intervention d’une équipe médicale multidisciplinaire, associant médecin traitant, médecin psychiatre, psychologue, infirmiers, aides à domicile, éducateurs, voire d’autres spécialistes (endocrinologue, cardiologue…). 

L’accompagnement en hôpital de jour permet au patient de bénéficier de l’intervention de l’ensemble de ces professionnels de santé et d’un grand nombre d’activités propices à sa guérison, comme : 

  • de la psychoéducation ; 
  • des ateliers de gestion du stress ; 
  • des groupes de parole pour discuter avec d’autres patients souffrant de la même maladie ;
  • de la rTMS, une technique médicale qui peut aider à traiter un épisode dépressif. 

  
L’hôpital de jour est également utilisé en relai de l’hospitalisation pour éviter au patient de se retrouver seul brutalement face à sa maladie et lui permettre de garder un lien régulier avec l’équipe soignante.

Enfin, il est important de noter que l’hygiène de vie est très importante. L’activité physique en est un bon exemple, puisqu’elle participe à la stabilisation par des mécanismes multiples. 

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